Midjourney poursuivi par Disney et Universal : bataille juridique historique sur l'IA
Jacky West / July 9, 2025
Midjourney poursuivi par Disney et Universal : bataille juridique historique sur l'IA
Le monde de l'intelligence artificielle générative est secoué par une confrontation juridique majeure. Disney et Universal Studios ont engagé des poursuites contre Midjourney, l'un des générateurs d'images par IA les plus populaires au monde. Cette action en justice, déposée en juin 2025, pourrait redéfinir les règles du jeu entre les créateurs de contenu traditionnel et les entreprises d'IA. Analysons les enjeux de ce conflit qui oppose deux visions de la création et de la propriété intellectuelle.
Pourquoi Disney et Universal attaquent-ils Midjourney ?
Les géants du divertissement accusent Midjourney d'avoir massivement violé leurs droits d'auteur en utilisant des milliards d'images protégées pour entraîner son modèle d'IA. Selon la plainte, Midjourney fonctionnerait comme un véritable "distributeur automatique virtuel" de contenu piraté, permettant à n'importe quel utilisateur de générer en quelques secondes des images de personnages iconiques comme Mickey Mouse, Dark Vador ou les Minions.
Horacio Gutierrez, directeur juridique de Disney, résume la position des studios avec une formule sans équivoque : "Le piratage est le piratage, et le fait que ce soit fait par une société d'IA ne le rend pas moins illégal". Cette déclaration marque une ligne claire dans le sable pour l'industrie du divertissement face aux pratiques controversées des IA génératives.
Les enjeux financiers de l'affaire
Midjourney n'est plus une petite startup confidentielle. Selon les documents présentés au tribunal, l'entreprise compterait aujourd'hui plus de 21 millions d'abonnés et aurait généré environ 300 millions de dollars de revenus l'année dernière. Ces chiffres impressionnants expliquent en partie pourquoi les studios ont décidé de passer à l'offensive.
| Parties concernées | Position | Enjeux financiers |
|---|---|---|
| Disney & Universal | Plaignants accusant Midjourney de violation massive de droits d'auteur | Réclament plus de 20 millions de dollars de dommages et intérêts |
| Midjourney | Défendeur | 300 millions de dollars de revenus annuels menacés |
Les studios réclament des dommages et intérêts qui pourraient dépasser les 20 millions de dollars. Mais au-delà de cette somme, c'est tout le modèle économique de Midjourney et potentiellement de nombreuses autres plateformes de génération d'images par IA qui est remis en question.
Les arguments juridiques qui s'affrontent
Cette affaire soulève une question fondamentale : une IA qui apprend à partir d'œuvres existantes est-elle comparable à un artiste qui s'inspire ou à une machine qui copie ? Les deux camps disposent d'arguments juridiques solides.
La défense probable de Midjourney
Bien que Midjourney n'ait pas encore présenté sa défense complète, les experts juridiques anticipent que l'entreprise s'appuiera sur la doctrine du "fair use" (usage équitable) du droit américain. Cette exception au droit d'auteur permet, sous certaines conditions, d'utiliser des œuvres protégées sans autorisation, notamment à des fins de recherche, d'éducation ou de transformation créative.
L'entreprise pourrait également argumenter que son modèle d'IA ne stocke pas les images originales mais apprend des motifs et des concepts généraux, créant ainsi des œuvres nouvelles et transformatives. Cette position a déjà été adoptée par d'autres entreprises d'IA comme OpenAI dans des affaires similaires.
L'argumentation des studios
Pour Disney et Universal, les images générées par Midjourney sont souvent des copies trop évidentes de leurs personnages et univers, sans la transformation créative nécessaire pour justifier l'argument du fair use. Les studios soulignent également que Midjourney a ignoré leurs demandes de cesser ces pratiques, démontrant ainsi une volonté délibérée d'enfreindre leurs droits.
De plus, le caractère commercial de l'activité de Midjourney joue en sa défaveur dans l'application de la doctrine du fair use, qui favorise généralement les usages non commerciaux ou éducatifs.
Un précédent majeur pour l'industrie de l'IA
Cette affaire pourrait créer un précédent juridique déterminant pour l'avenir de toutes les IA génératives. Si Disney et Universal l'emportent, les entreprises d'IA pourraient être contraintes de :
- Obtenir des licences pour les contenus utilisés dans l'entraînement de leurs modèles
- Mettre en place des filtres plus stricts pour éviter la génération d'images de personnages protégés
- Partager leurs revenus avec les détenteurs de droits d'auteur
- Modifier fondamentalement leurs méthodes d'entraînement des modèles
À l'inverse, une victoire de Midjourney pourrait consolider la position des entreprises d'IA et potentiellement affaiblir la protection du droit d'auteur à l'ère numérique. L'issue de ce procès sera scrutée de près par toute l'industrie technologique et créative, car elle pourrait redéfinir les frontières entre inspiration et appropriation.

La situation en France et en Europe
Bien que cette affaire se déroule aux États-Unis, elle aura des répercussions mondiales, y compris en France où la protection du droit d'auteur est traditionnellement plus forte. L'Union Européenne a déjà pris les devants avec l'AI Act, qui impose des obligations de transparence aux développeurs d'IA concernant les données utilisées pour l'entraînement.
En France, la législation sur le droit d'auteur est particulièrement protectrice et inclut le concept de "droit moral" qui n'existe pas dans le droit américain. Cette spécificité pourrait rendre les entreprises d'IA encore plus vulnérables aux poursuites sur le territoire français. Les protections légales pour les artistes face à l'IA sont en constante évolution pour s'adapter à ces nouveaux défis.
L'impact potentiel sur les utilisateurs d'IA générative
Si Disney et Universal obtiennent gain de cause, les conséquences pourraient être importantes pour les utilisateurs de Midjourney et d'autres outils similaires :
- Restrictions accrues sur les types d'images pouvant être générées
- Augmentation possible des prix d'abonnement pour couvrir les coûts de licence
- Développement de systèmes de filtrage plus stricts limitant la créativité
- Émergence possible de modèles d'IA alternatifs entraînés uniquement sur des contenus libres de droits
Pour les créateurs de contenu qui utilisent actuellement ces outils, il sera essentiel de suivre l'évolution de cette affaire et de s'adapter aux nouvelles règles qui pourraient en découler. Les pratiques de création assistée par IA pourraient devoir évoluer significativement.
Vers un nouveau modèle de collaboration entre IA et industries créatives ?
Au-delà de l'affrontement juridique, cette affaire pourrait catalyser l'émergence de nouveaux modèles de collaboration entre les entreprises d'IA et les détenteurs de droits d'auteur. Certains experts suggèrent que des partenariats stratégiques, comme des licences groupées ou des systèmes de partage des revenus, pourraient offrir une solution gagnant-gagnant.
Des entreprises comme Adobe ont déjà commencé à explorer ce terrain en développant des modèles d'IA formés uniquement sur des contenus sous licence ou libres de droits. Cette approche pourrait devenir la norme si les tribunaux donnent raison aux studios.
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Conclusion : un tournant décisif pour l'IA générative
L'affaire Disney et Universal contre Midjourney marque un tournant décisif dans l'histoire encore jeune de l'IA générative. Elle soulève des questions fondamentales sur l'équilibre entre innovation technologique et protection de la propriété intellectuelle, entre démocratisation de la création et juste rémunération des créateurs originaux.
Quelle que soit l'issue de ce procès, il est clair que l'industrie de l'IA générative entre dans une nouvelle phase de maturité où les questions éthiques et juridiques prennent une importance croissante. Les entreprises qui sauront naviguer ces eaux troubles et proposer des solutions respectueuses des droits d'auteur tout en préservant le potentiel créatif de l'IA seront celles qui façonneront l'avenir de ce secteur en pleine effervescence.
Pour les créateurs, utilisateurs et développeurs d'IA, rester informé des évolutions juridiques dans ce domaine devient aussi important que de maîtriser les aspects techniques de ces outils. La bataille juridique ne fait que commencer, mais ses conséquences façonneront le paysage technologique et créatif pour les années à venir.